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Ma société est en difficulté. Que faire depuis le  nouveau code des sociétés ?

Jordan Vandamme Publié le 15 avril 2023 Modifié le 21 avril 2023
Ma société est en difficulté : que faire depuis le nouveau code des sociétés ?

La vie d’une entreprise n’est pas toujours un long fleuve tranquille et, parfois, il arrive que celle-ci enregistre des pertes successives la poussant dans une position financière compliquée. Cette situation n’est pas souhaitée, ni tolérée, par le droit des sociétés qui prévoit que les dirigeants doivent réagir à l’urgence de la situation en enclenchant la procédure dite «de la sonnette d’alarme». En effet, il est inutile de s’entêter à maintenir artificiellement en vie une entreprise sans espoir de redressement. D’ailleurs, un dirigeant agissant de la sorte pourrait voir sa responsabilité personnelle engagée et assumer les dettes de la société sur ses propres deniers.

A quel moment faut-il réagir ?

La procédure de la sonnette d’alarme n’a pour objet que de confronter le dirigeant aux difficultés financières de sa société, celui-ci étant invité à proposer des mesures de redressement en vue d’assurer un avenir au projet d’entreprise, avec l’approbation des actionnaires de la société. Le second objectif est également de dissuader les dirigeants qui s’entêtent à poursuivre des activités déficitaires, au risque d’accroître l’endettement et donc, potentiellement, le nombre des personnes lésées en cas de faillite.

Jusqu’alors, les éléments déclencheurs de la procédure d’alarme s’articulaient autour de l’état des fonds propres comptable par rapport au capital de votre société. Oui mais, si rien n’a changé sur ce point pour les sociétés anonymes avec l’arrivée du nouveau code des sociétés, il n’en va pas de même pour les nouvelles SRL, puisque la notion de capital y est simplement bannie !

Etant donné cette spécificité propre aux SRL, il était impératif de faire apparaître des indicateurs spécifiques et deux critères déterminants ont été retenus, à savoir, le résultat d’un test de l’actif net et d’un test de liquidité.

En application de ces méthodes un peu subjectives, si votre actif net est négatif, ou risque de le devenir, et/ou s’il n’est pas certain que la société pourra s’acquitter de ses dettes au moins au cours des 12 prochains mois, la procédure d’alarme devra être déclenchée.

Et pour les autres formes de sociétés ?

Pour rappel donc, pour les formes de sociétés prévoyant encore un capital, la pièce se joue toujours en 2 actes et la procédure d’alarme doit être enclenchée si :

  • 1er acte : Les fonds propres comptables deviennent inférieur à la moitié du capital social.
  • 2e acte : La situation se dégrade encore et les fonds propres descendent en dessous du quart du capital social

Quand et comment procéder ?

Lorsque l’organe d’administration détecte l’activation des critères spécifiques aux SRL, ou s’il est informé de la perte soit de la moitié ou des 3/4 du capital social dans les autres formes de sociétés, il est tenu de convoquer une Assemblée Générale dans les 2 mois de ce constat, c’est une obligation. Un bilan, une situation provisoire,… sont autant de moments clés où une telle perte peut être constatée. Et faisons tout de suite bref procès à une idée trop répandue, il est inutile de tenter de se retrancher derrière une apparente ignorance en matière de comptabilité ou une quelconque désinformation, ça ne marche pas !

L’Assemblée Générale ainsi convoquée doit statuer et faire un choix parmi 2 possibilités, sur base du rapport que lui aura préparé et remis, 15 jours avant, l’organe de gestion de la société :

  • Soit, elle valide les mesures de redressement proposées dans le rapport
  • Soit, elle opte pour la mise en dissolution de la société. Dans ce cas, l’organe d’administration devra organiser une seconde assemblée, devant notaire cette fois.

Attention : Le rapport sur les mesures de redressement éventuelles fait souvent défaut dans les PME, alors qu’il est d’une importance capitale notamment car, en cas de faillite ultérieure, c’est sur base de ce rapport (et de ses lacunes ou manquements éventuels) que la responsabilité des dirigeants pourra être envisagée. De même, s’il n’existe pas, les décisions de l’Assemblée Générale sont réputées nulles impliquant, là aussi, la responsabilité des administrateurs. Prudence !

Et si les tiers prenaient le contrôle de votre destin ?

Si la situation se dégrade encore et que les fonds propres deviennent négatifs, tout tiers intéressé peut demander la dissolution de la société en justice et c’est loin d’être anodin car cela l’expose à un risque de tous les instants. Une dette impayée ou litigieuse à l’égard d’un fournisseur et celui-ci peut vous conduire de sa propre initiative vers la déconfiture. Vous pourriez ainsi être étonné, un jour, de l’annonce de la mise en dissolution de votre société suite à la requête unilatérale d’un client insatisfait de vos prestations ou  de n’importe quel concurrent soucieux de vous voir quitter le marché concurrentiel.

Toutefois, cette possibilité est assez méconnue sauf… par les Administrations (Fisc et ONSS) qui recourent très souvent à cette possibilité pour obtenir la dissolution d’une société. Si vous êtes dans ce cas, sachez que le tribunal peut accorder un délai en vue d’améliorer la situation de vos fonds propres mais c’est quand même de mauvaise augure.

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Rien ne va plus !

La voie est désormais sans issue, l’activité n’est plus viable, l’organe d’administration déplore d’une part la cessation de paiement et, d’autre part, le fait que le crédit est ébranlé, c’est-à-dire que les crédits ont été dénoncés ou qu’il est impossible d’obtenir la moindre avance de la part du secteur bancaire.

A ce stade, il est de la responsabilité exclusive de l’organe d’administration, sans autorisation d’une Assemblée Générale, de procéder à l’aveu de faillite. Les actionnaires ne doivent donc pas être consultés, les gérants ou les administrateurs doivent agir de leur propre initiative, sous peine d’une responsabilité accrue.

Et si vous ne respectez pas cette procédure et vos obligations ?

Vous l’aurez compris, au fur et à mesure de la dégradation de la situation de votre société, il existe des obligations très formelles comme :

  • Convoquer des Assemblées Générales
  • Établir des rapports sur les mesures de redressement
  • Faire aveu de faillite, d’initiative, si la situation est sans issue

Si vous êtes en défaut d’avoir organisé l’une ou l’autre des Assemblées Générales, ou d’établir les rapports préalables, les dommages subis par les tiers seront présumés résulter de vos manquements. Le risque est donc grand que votre responsabilité soit engagée soit par vos créanciers, soit par un curateur en cas de faillite et ils ne vous rateront pas si vous leur donnez le bâton pour vous battre !

Cette responsabilité éventuelle est en outre “solidaire” entre les administrateurs sauf à démontrer qu’ils ont signalés les manquements soit lors d’un Conseil d’Administration ou d’une Assemblée Générale, ce qui, en pratique, est très compliqué. Par ailleurs, même si vous respectez la procédure d’alarme à la lettre, sachez que l’entêtement peut vous conduire vers la mise en cause, notamment si vous vous êtes borné à poursuivre une activité alors que tout été perdu, d’où l’importance de bien étayer les rapports de l’organe de gestion.

Et pourtant, les manquements sont réguliers !

L’intention du législateur au travers de cette procédure d’alarme est louable puisqu’elle vise à conscientiser les dirigeants et à protéger les tiers. Pourtant, elle est trop souvent négligée et, à mon sens, cela est dû au fait qu’au cœur de la structure de nombreuses entreprises, et notamment dans la masse des PME et TPE, les actionnaires et les dirigeants de fait sont souvent les mêmes acteurs, ce qui les conduit à négliger cette procédure d’alarme, jugée inutile, car les rôles ne sont pas clairs, confus, mais c’est la porte ouverte à tout risque de solidarité en cas de déconvenue. C’est encore plus sensible dans les sociétés de type unipersonnelle. L’arme peut donc se retourner contre son utilisateur, attention au double tranchant!

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